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16 juin 2009 2 16 /06 /juin /2009 00:01

Que d’émotions, parfois larmes aux yeux, de désolation et de consternation, hier, à Salamandre, la paisible station balnéaire, sise à quelques minutes du centre-ville de Mostaganem, ébranlée, pour le second jour, par le chantier en charge de la mission de démolition du pâté de bâtisses « coincées » entre la route et la rive qu’elle prolonge à partir du port de pêche en cours de réalisation. Edicté par le plan d’aménagement du front de mer de la cité pittoresque, plusieurs dizaines de constructions figurent au programme de la démolition entamé dimanche, qui devra toucher 51 particuliers y domiciliés. Les membres de l’association culturelle El-Moudja ayant cédé dans l’après-midi d’avant-hier dimanche, après qu’on leur ait proposé une école primaire désaffectée, pour y activer et entreposer leurs matériels et équipements, le chantier avait repris, sous une tension moindre, mais sous une couverture policière particulièrement musclée.
Dans la précipitation, à peine les derniers ustensiles étaient chargés sur les camions, mobilisés pour le déménagement des familles, que les bulldozers affaissaient, dans de gros et épais nuages de poussière suffocantes, les bâtisses. En deux temps et trois mouvements, y compris le commissariat de police, une dizaine de constructions étaient en ruine. Le chantier sera arrêté, en début d’après-midi, juste avant ‘’d’effacer‘’ le petit théâtre ou la troupe El-Moudja élisait domicile. Au fur et à mesure du transfert ‘’tumultueux» des familles vers Kharroba, dans une nouvelle cité, que l’on nous dit encore en chantier de construction, la tension cédait la place au chagrin et l’expectative. ‘’Je suis venu à l’âge de 8 ans, c’était le 24 janvier 1964 exactement. Il n’y avait que 9 locataires à Salamandre, ay lendemain du départ des pieds-noirs. Comment pouvez-vous consentir qu’on vous arrache de votre berceau ?, nous lâche un septuagénaire qui logeait au flanc du théâtre démoli. Mouchoir dans la main pour essuyer de temps à autre les larmes qui tentaient de lui échapper, il enchaine : ‘’Ce n’est pas la wali qui a décidé la défiguration de Salamandre, ce sont des Mostaganémois opportunistes, nourrissant des desseins occultes qui ont été les ‘’initiateurs» du projet». ‘’On nous a proposé une compensation de 7500 dinars/m2, alors que l’Etat (allusion faite à l’Agence foncière) vend les terrain à raison de 32.000 dinars/m2. Est-ce équitable ? Comment pouvez-vous admettre qu’on vous ‘’pende» en haut d’un immeuble, si vous avez toujours vécu, dans une maison individuelle ? Et puis, il n’ya pas que le logement qu’on perd, qu’adviendra-t-il du pêcheur qu’on refoule à Chemmouma ou ailleurs, loin de son espace d’activité ordinaire ?» Notre interlocuteur était intarissable de questions à réponses évidentes.
Sous le regard vigilant des policiers, la spéculation et les commentaires allaient bon train, parmi les ‘’groupuscules» de gens curieux, des voisins non concernés par la démolition. ‘’C’est parce que Mme le wali va être muté ce 20 juin que l’opération a été précipitée’ !’, lance un jeune prétendant être au su de ce qui se trame dans les rouages administratifs. Dans les parages, outre les équipes techniques de la commune ou de Sonelgaz qui accompagnaient le chantier, nombre de charretiers, commerçants de ferraille avaient pris position, en quête du moindre ‘’bout» de métal récupérable.
Parmi les 51 familles concernées, certaines, outre le dédommagement, ont été relogées ailleurs, à Kharroba. Le reste des locataires contestait la compensation financière. Des actions, contestant les montants des indemnisations allouées, introduites auprès de la justice, sont encore pendantes, alors que l’opération de démolition soit engagée. En ce site particulièrement envié par les enchérisseurs, le service des domaines aurait proposé des indemnisations jugées dérisoires. Il allait de soi que la contestation et l’opposition n’allaient pas tarder.
Il y a quelques jours, l’administration a entrepris les démarches pour préparer le déménagement que l’on savait insupportable, non seulement par les habitants, même indemnisés, mais également, par tous les amoureux de cette chère bourgade balnéaire.
Prévu depuis quelques années déjà, par le plan d’aménagement de la façade maritime des deux cités mitoyenne de la Salamandre et la Crique, en un front de mer, long de 1,8 kilomètres, en double voie, le projet concernait quelques 51 ‘’propriétaires». Les uns titulaires d’actes de propriété, ont été indemnisés. Pour les autres, c’était la négociation qui fut envisagée.
Outre les résidences, le commissariat de police de la cité, la caserne de la garde communale de la Crique, le vieux théâtre d’Osmane Fethi où la troupe El-Moudja élisait domicile, le convivial et sympathique restaurant ‘’Les Abysses», et les deux dernières maisons sur pilotis ayant survécu jusque-là, qui devaient être ‘’effacés» de la côte. C’était non seulement un pan qui conférait à la Salamandre son cachet particulier caractéristique, mais surtout des bâtisses, voire des ‘’monuments», qui trainent derrière une longue Histoire et des histoires heureuses ou malheureuses, de la nostalgie, des souvenirs inoubliables. C’était pourquoi la réticence quant à la démolition était aussi acerbe et véhémente.
Quiconque aura fréquenté le site ayant inspiré, imprégné ou marqué des milliers d’artistes, n’aura certainement pas avalisé cette transformation. M. Belarbi

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